PRENOM NOM - raffer burns. Quand on t'a demandé si t'avais un lien de parenté avec le mec jaune dégarni auquel on a interdit l'appareil dentaire des Simpsons, tu t'es regardé dans le dos d'une cuillère pendant quinze minutes en fronçant les sourcils. / DATE DE NAISSANCE ET ÂGE - trente ans déjà, né en août 84. T'es vierge, sur le papier. / PAYS DE NAISSANCE - t'es un rosbeef, un buveur de thé, et t'as l'accent qui va avec. D'ailleurs t'as pas vraiment le droit d'être aux Etats-Unis, mais chut. / ORIGINE ET NATIONALITÉ - chez toi tout est anglais, de ton teint pâle à ton goût démesuré pour les fish and chips et les puddings. / MÉTIER/ÉTUDES - t'es agent d'entretien embauché au black au grocery store, puis artiste de rue minable qui fait des tours de magie et lit l'avenir. Tu fais comme tu peux. / ÉTAT MONÉTAIRE - un petit pactole de 500 dollars que tu planques comme les vieilles mémés. / ORIENTATION SEXUELLE - homosexuel. Mais tu peux bien faire semblant d'aimer les gros seins si y'a moyen que la gonzesse t'héberges. / STATUT CIVIL - en couple avec le premier qui te tombe sous la main. Si si, même s'il n'est pas d'accord. / TRAITS DE CARACTÈRE - intrusif; sans gêne; exubérant; comédien; affabulateur; opportuniste; collant; débrouillard; bizarre; impulsif; souriant; passionné; surprenant; pacifiste; froussard; attachant. / GROUPE - gone tonight.

Trying to make it on my own, I thought I could never do this alone.

ta spécialité, c'est le squat. T'as nulle part où crécher et pas suffisamment d'argent pour prétendre à une piaule, même la plus minable. Alors tu te démerdes pour éviter de dormir sous les ponts. Tu dragues dans les bars pour finir dans le pieu d'un potentiel tueur en série, t'attendris une petite mamie avec tes yeux de merlan frit en lui racontant que t'es un soldat rentré d'un pays pourri et que t'es tout perturbé, tu trouves un couchsurfer sympa et tu t'fais passer pour un anglais qui découvre new-york. Enfin, t'as quelques ficelles et un système bien rôdé qui fonctionne plutôt bien. ━ les talents de liseuse de bonne aventure avec lesquels tu frimes dans la rue, c'est pas du pipeau. T'as été hébergé par une vieille tzigane pendant trois mois l'an dernier, et elle t'a tout appris. [...] Bon ok, c'est peut-être un peu du pipeau mais ça attire les touristes en masse. En même temps tu proposes ça avec tes tours de magie, t'annonces clairement la couleur. ━ t'adores les disneys. Tu les connais tous par coeur, même si ça fait clairement pitié. Ton préféré c'est dumbo, parce que c'est comme ça que te surnommaient tes camarades de classe quand t'étais petit, à cause de tes oreilles décollées. Tu leur as rétorqué que toi aussi un jour, tu t'envolerais. Bon, ces cons l'ont pris au sens premier, t'ont poussé d'un toit et t'as eu les deux jambes pétées mais peu importe. De toute façon, t'as rien senti. ━ parce que ouais, t'as une petite particularité médicale qui fait de toi un être exceptionnel -youpi-. T'es atteint d'une insensibilité congénitale à la douleur. La douleur, t'as aucune idée de ce que c'est. On pourrait penser que c'est super cool, mais c'est plutôt très emmerdant. Tu pourrais bien rester la main posée sur une plaque électrique et te brûler la peau tout en discutant de la fonte des glaces au pôle nord. T'as un pote médecin qui t'auscultes gratuitement toutes les trois semaines, pour s'assurer que tu vas pas crever d'une connerie dont tu n'te serais même pas rendu compte. ━ t'es sur le territoire des états-unis depuis huit ans ans, mais t'es en situation irrégulière depuis un peu plus de cinq ans. Tu t'es produit à broadway pendant trois ans, un rôle secondaire dans Tarzan -si si, t'es sexy avec des dreads-, puis Billy Eliott. Mais tu t'es fait virer comme un malpropre et tu t'es retrouvé sans visa en apprenant une chose essentielle : ne jamais baiser avec un recruteur. ━ cette situation commence sérieusement à te peser, déjà si t'étais mieux payé qu'un mexicain qui a illégalement traversé la frontière ta vie serait différente. Tu te fais vieux pour ces conneries, alors tu cherches désespérément un pigeon à qui passer la bague au doigt. Parce que la loterie t'as eu beau essayer, t'as jamais gagné. Fille, garçon, gauchiste révolté conscient du caractère bidon de votre union, pauvre naïve qui n'y voit que du feu, tu t'en carres pourvu que t'arrives à ton but. Enfin tu n'craches pas sur un mariage d'amour bien sûr, t'es un peu cendrillon sur les bords. Mais t'as pas la bêtise de croire que ton prince charmant va tomber du ciel et accepter de t'épouser rapidement en sachant que t'es en situation irrégulière et que tu lui fais possiblement à l'envers. [...] Quoique. "You've got to believe in magic", comme dirait l'autre. ━ t'es ce qu'on appelle communément un aimant à emmerdes. T'es toujours plein de bonne volonté, mais à chaque fois ça finit en catastrophe. Quand tu veux préparer le petit-déjeuner le grille-pain prend feu, quand tu nourris le chien de ton bon samaritain du moment il s'étouffe et crève, quand t'essaies de déboucher le robinet tu provoques une inondation. D'ailleurs, tu te fais souvent gentiment mettre à la porte à cause de ça, parce que t'as beau être sympa faudrait te ligoter à un siège pour éviter que tu détruises tout. ━ tu te déplaces exclusivement en skate, et t'es un vrai danger public. Tu slalomes, tu frôles, tu heurtes parfois, tu t'excuses en souriant, tu tentes des figures impossibles en sautant des escalier, tu te viandes. ━ t'as souvent du mal à manger à ta faim. T'as quelques combines pour grappiller à droite et à gauche, en plus des produits périmés que tu récupères gracieusement à ton boulot. De temps en temps, tu participes aux réunions des alcoolos/drogués/cancéreux/colériques anonymes pour piquer des gâteaux, ou tu te plantes une fourchette dans la main pour un café à l'hosto. D'autres fois t'empruntes, tout simplement -sans jamais rendre-. Tu sais être inventif, et pour une bonne entrecôte saignante tu serais prêt à vendre ta grand-mère -si seulement t'en avais une-. ━ t'as un cousin à new-york, blindé de fric. Mais il a juré de ne plus jamais te parler et t'a déjà envoyé sur les roses une dizaine de fois quand t'es venu lui réclamer l'aumône. C'est vrai, t'aurais peut-être pas dû revendre son audi sur internet pour payer tes dettes, mais c'était ça ou les flics s'en mêlaient et t'étais bon pour l'expulsion. Tu comprends qu'il se soit senti trahi, mais à l'époque t'étais dans une putain de mauvaise passe. Tu ferais plus ça aujourd'hui, tu te contenterais de son vélo. ━ t'as un tatouage tout pourri, une licorne obèse qui envoie un coeur gravée sous l'aisselle gauche. T'avais avalé une pilule rose avec un membre du groupe des narcotiques anonymes, et t'as hurlé le lendemain matin. T'as d'abord harcelé ton pote médecin pour vérifier que t'avais pas chopé une hépatite ou une autre saloperie du genre, puis la tatoueuse pour essayer de gommer cette merde -sans succès, bien sûr-. Le point positif, c'est que t'as fait une belle rencontre, celle d'une chieuse au grand coeur. Et puis tu l'assumes ta licorne, tu l'as même appelée "Charlie". ━ t'es un pacifiste. Tu tolères mal la violence, les éclats de voix et la vue du sang. Pourtant parfois, on dirait que tu fais tout pour les provoquer. Toi, tu restes toujours zen. T'es le genre de débile qui va rire à la gueule des gens qui l'insultent et proposer le dialogue à un type qui pointe un flingue sur lui. C'est sans doute aussi parce que pour toi se battre revient à coller une gifle molle, en revanche tu cours très vite. ━ parfois, pour t'en sortir, tu voles des trucs qui ne t'appartiennent pas. Chez les gens qui t'hébergent, chez tes voisins de bus, chez tes différents employeurs. Tu le regrettes toujours, une fois que c'est trop tard. Parfois tu t'excuses. ━ parce qu'en plus d'être fauché, tu t'retrouves souvent avec des ardoises un peu partout. Surtout au bar du coin, et chez le bookmaker qui prend tes paris sur les courses hippiques. T'y connais foutrement rien, mais la vieille tzigane t'as dit que tu deviendrais riche en pariant sur un cheval qui porterait le numéro 2. Alors depuis, tu fais ça comme un rituel, en attendant que la prophétie se réalise.

But now I'm walking by myself, Out in the middle of nowhere

« Raffer. » Oh merde, tu la connais bien cette intonation, deux syllabes prononcées avec trop de langueur, trop de sérieux pour être de bon augure. Comme les parents qui utilisent le prénom entier de leurs enfants lorsqu'ils ont quelque chose à leur reprocher. Et ce regard bordel, cette gêne qui rend les yeux fuyants, mêlée à une lassitude dont t’es sans aucun doute à l’origine. Ce pli aussi, entre ses deux sourcils, témoin d'une légère contrariété. Et la veine saillante de son cou qui pulse de façon anormalement rapide. Tu sais exactement ce que Tony s'apprête à te dire, et pas grâce à tes talents de médium bidons. C’est juste que c’est toujours comme ça que ça se termine, toujours. Il faut que t’enrayes le rouage qui continue paisiblement de tourner à tes dépens, il faut que tu trouves un truc à dire, un truc à faire pour distraire son attention. L'embrouiller. Le faire douter. Tu pourrais bien tirer sur le rideau pour le rapprocher de la flamme frémissante de la bougie, parler sans discontinuer de la construction de la ville de new-york, renouer avec tes dons d’acteur pour simuler une crise cardiaque, ou tout simplement occuper ses lèvres pour l’empêcher de lâcher la bombe. Sauf qu’à la place, on ne sait pour quelle stupide raison, tu te contentes de pointer ton index vers l’écran de télévision allumé en lâchant un « OH PUTAIN » sonore, espérant qu’il y ait eu un débarquement de licornes à Londres, une invasion extra-terrestre à Paris ou la résurrection de Michael Jackson pour te sauver la mise. Seulement voilà, quand ses pupilles rejoignent la même direction que les tiennes, elles ne se confrontent qu’à une présentatrice botoxée coincée dans une mini-jupe qui se tient à côté d’une carte grossière de l’état de new-york. Sans déconner … EVIDEMMENT il fallait que tu tombes sur la minute météo, quelle guigne. « Il va faire 20 degrés demain matin, t’arrives à le croire ça ? » Ouais, t’aurais dû opter pour l’incendie. Parce que ton beau sourire niais et ton papillonnement innocent de paupière ne parviennent pas à empêcher l’inévitable. « Je suis désolé Raff, mais je peux plus t’héberger. » Tu sais bien qu’avec lui il est inutile de te mettre à pleurer, t’avais déjà eu de la chance que ça fonctionne avec Marco. « J’ai remarqué tu sais, que mon éléphant en ivoire a disparu. » Et merde, ce putain de pachyderme. Tu savais bien que le remplaçant en papier blanc que t’avais maladroitement fabriqué n’allait pas faire illusion très longtemps. T'as jamais été très doué pour les travaux manuels, même si t'étais quand même assez fier de l'armature en carton que t'avais réussi à mettre sur pied. Mais trois semaines, c'était trop rapide pour s'en prendre à la bête à cornes. « Attends si c'est que ça, l'animal en carton c'est temporaire hein, j'ai bien l'intention de ... » « C'est pas que ça. » Crétin, crétin, crétin, pourquoi t'avais commencé ta phrase comme ça. Tu lui avais tendu la perche pour te faire couler.
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