deux-mille-douze, vingt-deux ans. « Mesdames et messieurs, ici votre commandant de bord, nous abordons notre descente vers New-York. Aussi, nous invitons chacun d’entre vous à regagner son siège et à s’assurer que ses bagages à mains sont bien situés sous le siège devant eux ou dans les coffres réservés à cet effet. Merci à tous. » La voix du pilote résonnent encore dans la cabine de l’avion alors que Lana se réveille peu à peu, sortant de sa léthargie. Lorsque son regard se perd, à travers le hublot, dans l’immensité de la ville qui s’étend sous ses yeux, un sourire étire les traits fins de son visage. Elle se souvenait encore. Il y a cinq mois, quand elle avait annoncé son départ pour l’Italie, Lana avait créé une véritable discorde entre son père et sa mère. L’une affirmant qu’elle était égoïste de partir aussi loin, aussi longtemps, et qu’à son âge elle ne tiendrait pas une semaine. L’autre l’encourageant à entreprendre un tel voyage. Dorénavant, Lana ne saurait dire si la vie qu’elle avait menée en Europe l’avait véritablement changé. Selon elle, elle avait gagné en maturité et en courage, mais peut-être qu’elle se leurrait. Alors, lorsque les roues de l’avion touchent l’asphalte de la piste d’atterrissage, Lana ne peut s’empêcher de penser à tout ce qui lui avait manqué durant ses cinq mois. A présent elle voulait redécouvrir la ville de son enfance, fouler à nouveaux les rues de Brooklyn et goûter aux pâtisseries de chez At Penny’s. Passant une main dans ses cheveux coupés courts et légèrement ondulés pour l’occasion, Lana saisit son sac à main avant de suivre les autres passagers vers la sortie. Dans moins d’une heure, elle sera enfin de retour chez elle.

deux-mille-quatorze, vingt-quatre ans. Ses doigts pianotent avec vigueur sur les touches de son ordinateur portable alors que son professeur explique en long, en large et en travers la psychologie du développement et de l’éducation. Plus que cinq minutes et elle allait partir loin de cette salle. Quelques secondes auparavant, grâce à une force de conviction qu’elle ne soupçonnait pas, Lana avait fini par se persuader que les bruits de protestation qui émanaient des touches brutalisées de son MacBook allaient enfin estomper le sentiment d’ennui profond qui brulait en elle. Sa deuxième erreur de la journée, la première étant d’avoir accepté de se rendre à ce cours pourtant facultatif. « Psss, Baldwin. » Il ne manquait plus que lui pour que cette journée soit un véritable enfer. Faisant mine de pas avoir entendu, Lana ne se retourne pas. Non, elle n’avait certainement pas besoin d’entendre la voix insupportable de l’homme assis une rangée derrière elle. « Je sais que tu m’entends Lana. » « Qu’est-ce que tu veux Weston ? » se contente-t-elle alors de répondre dans un souffle résigné. Ce qu’elle pouvait le détester. Son être tout entier semblait même s’accorder à dire que Oliver Weston était un crétin de premier ordre. De sa voix à sa manière de marcher, tout chez lui l’exaspérer. « J’ai vu que tu cherchais un coloc et ça tombe bien parce que, je cherche un appart. » Est-il sérieux ? Elle ne peut contenir plus longtemps un rire dès plus ironique alors que le professeur met un point final à ses explications. Enfin. « Tu rêves, essaye avec quelqu’un d’autre. » Refermant son ordinateur portable en vitesse, Lana le range avec hâte dans son sac avant de se diriger vers la sortie la plus proche d'elle. Il y avait pourtant une chose qu'elle n'avait pas prévu dans son plan, tomber nez à nez avec un Oliver fier de son coup quelques marches plus bas. « Bouge de là, Ollie. » dit-elle avant de lui donner un coup d’épaule et de descendre deux à deux les dernières marches de l’amphithéâtre. « Ne m'ap... Et attend, t’as un train à prendre ou quoi ? » Faisant abstraction de l’homme qui courait derrière elle, Lana presse de plus en plus le pas. Elle devait sérieusement avoir un mauvais karma. Il n’y avait aucune autre raison valable pour justifier un tel acharnement de la part d’Oliver. « Allez soit sympa, j’ai vraiment besoin de toi. » Si elle ne voulait pas l'admettre, il restait pourtant évident que Lana avait elle-aussi besoin d'Oliver, ce même si elle le détestait. Cela faisait plus de deux mois que la brune cherchait un colocataire, en vain, et, aujourd'hui alors qu'elle enchaînait ses heures d'études et ses heures de serveuse, elle n'avait jamais été aussi épuisée de toute sa vie. « Ce soir, dix-neuf heures chez moi. Arrive une minute en retard et tu peux être sûr que tes chances de venir vivre chez moi sont réduites à zéro. »